Une profession en crise

En Grande-Bretagne, elles se qualifient de Desperate Midwives (sages-femmes désespérées). Elles fuient désormais le pays depuis le Brexit, laissant leurs consœurs dans une situation inconfortable. En France, elles mènent une énième grève depuis le début de l’année 2021, après 20 ans de revendications. Les maternités françaises vivent une pénurie de sages-femmes. En effet, le rythme et les conditions de travail sont tels qu’elles préfèrent partir pour s’installer en cabinet. Les horaires y sont plus souples et les salaires plus élevés – et surtout, elles peuvent ainsi prendre le temps nécessaire pour chaque consultation. Leur absence dans les établissements publics entraîne un risque de fermeture de ces lieux essentiels pour les mères. La profession de sage-femme, au sein même de celle des soignants plus globalement, est donc en crise.

Il est urgent de reconnaître ce métier essentiel

La profession a considérablement évolué entre 1998 et 2021, avec toujours plus de compétences et de responsabilités. Les maïeuticiennes ne jouent pas uniquement un rôle central pendant la grossesse, la naissance et le post-partum. Elles peuvent aussi assurer le suivi quotidien de la santé des femmes, en gynécologie et même plus largement, y compris en accompagnant les projets de natalité. La revalorisation de la profession des sages-femmes, c’est aussi celle de toutes les femmes, et la protection des enfants.

#1femme1sagefemme

Une femme qui accouche a besoin d’une sage-femme et/ou d’une doula auprès d’elle tout au long de son travail, sans partage. La réalité est loin de ça, avec environ 3 sages-femmes pour 8 accouchements. C’est en faisant ce constat qu’Anna Roy a lancé les hashtags #jesuismaltraitante et #1femme1sagefemme sur les réseaux sociaux. Selon l’Ordre national des sages-femmes, les effectifs drastiquement réduits en maternité mettent en danger la sécurité des patientes et de leurs bébés.

Du temps et de la liberté

Dans le documentaire À la vie d’Aude Pépin, sorti fin octobre 2021, la sage-femme engagée Chantal Birman souligne et questionne la puissance confisquée des femmes. « Entre la vie et la mort, les femmes choisissent toujours la liberté, témoigne-t-elle. Le travail de la sage-femme est d’aider les femmes à être le plus libres possible, à pouvoir négocier tout ce qu’elles peuvent négocier, pour pouvoir se sentir fortes en elles-mêmes. » Dans les hôpitaux, on demande aux sages-femmes d’être des techniciennes. Or elles ont besoin de temps pour accompagner les femmes.

En France 80 % des accouchements sont réalisés par des sages-femmes. Ce 22 novembre 2021, le gouvernement a fait un premier pas pour leur reconnaissance en revalorisant le salaire mensuel des sages-femmes hospitalières à hauteur de 500 € net supplémentaires. Reste à progresser sur les valeurs humaines sur lesquelles sont basées leur vocation.